Si la littérature scientifique sur le sujet des modes de liaison de prédications, et en particulier sur les structures lexicalement marquées est particulièrement prolifique (i.e. Allaire 1982, Lehmann 1988, Savelli 1993, Muller 1996, Béguelin 2003, Hadermann et al. 2006, Mouret 2007, Hadermann et al. 2010, Hadermann et al. 2013, Roig 2013), la question des structures « non marquées » a nettement moins retenue l’attention des linguistes. Parmi les auteurs qui se sont penchés sur cette problématique, on trouve néanmoins Allaire (1982), qui fait état de cinq structures syntaxiques non marquées et qui, selon elle, relèvent toutes de l’hypotaxe :
- négation V1 et/que V2 (Il n’est pas encore huit heures qu’il a déjà téléphoné deux fois) ;
- inversion V1 et/que V2 ((À peine) arrive-t-il qu’il me faut déjà partir) ;
- Que V1 et V2 (Qu’il ose seulement pointer le bout de son nez, et il verra de quel bois je me chauffe) ;
- ø V1 et V2 (Tu grattes, et tu gagnes) ;
- N et V2 (Du fric, et je disparais).
Plus récemment, Corminboeuf, dans le cadre de ses recherches sur les constructions hypothétiques en français (2007, 2008, 2009), revient sur quelques-unes de ces constructions, notamment sur les structures N et V2, V1 (que/et) V2 ou Que V1 (et) V2. Bien qu’elles soient à l’origine d’une lecture conditionnelle, dit-il, ces constructions relèvent toutes du mode de la parataxe. L’idée d’une jonction par coordination des séquences formant ce genre d’énoncés est relayée par des auteurs comme Adler (2012), qui reconnaissent toutefois que ces structures ne réagissent pas toujours de la même façon que les coordinations canoniques face à des critères comme la possibilité de conjuguer les verbes à des temps perfectifs dans les prédications de la construction sans en altérer la lecture, l’ellipse de V2, ou encore la possibilité de démultiplier les séquences prédicationnelles dans l’énoncé.
À mi-parcours entre les deux positions, Culicover & Jackendoff (1997, 1999) proposent de voir dans les énoncés du type One can of beer and I’m leaving, la manifestation d’une coordination syntaxique mais d’une subordination sémantique, laquelle motive les blocages identifiés dans les structures non marquées, non recensés pour les coordinations classiques. Cette option, comme l’écrit Adler, semble également partagée « par Deane (1992), Lakoff (1986) et Schmerling (1975), entre autres, mais ces auteurs, tout en promouvant l’idée d’une interprétation subordonnante de la proposition […] ne précisent pas […] si cette structure reste une structure de coordination » (2012 : 1674).
Ce colloque entend revenir sur ces structures corrélatives non marquées, en confrontant en portant sur ces constructions un regard multifactoriel, aussi bien sémantique et informationnel que morphosyntaxique ou prosodique.
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